Guardians of the Galaxy Vol. 3
Notre bande de marginaux favorite a quelque peu changé. Peter Quill, qui pleure toujours la perte de Gamora, doit rassembler son équipe pour défendre l’univers et protéger l’un des siens. En cas d’échec, cette mission pourrait bien marquer la fin des Gardiens tels que nous les connaissons.
Superhero
fatigue
Tiens ! Qui
voilà ? Les Gardiens de la Galaxie signent leur retour. Et avec eux renaît
l’espoir de voir un Marvel Cinematic Universe redresser la barre. Aux abois, la
Maison des (sans ?) Idées vit une réelle panne de créativité. On ne va pas
se mentir, le MCU toussote depuis belle lurette. Il participe grandement à la superhero fatigue, phénomène de
lassitude qui inquiète au plus haut point les majors hollywoodiennes. En toute franchise, le dernier bon film
remonte à cinq ans avec la sortie d’Avengers : Infinity War. Depuis, rien de
bien palpitant. Au mieux, une superproduction lisse et ultra-formatée mise en
scène avec panache (Doctor Strange in The Multiverse of Madness), au pire
une daube d’un ennui intersidéral (Avengers : Endgame). Le reste se situe
dans les profondeurs abyssales de l’oubli. Alors que Peyton Reed était censé
remettre l’univers étendu sur des rails avec Ant-Man and The Wasp :
Quantumania, premier métrage de la Phase 5, ce fut la douche froide pour la fanzouze, encore groggy suite au
préjudice narratif et visuel subi. Les aficionados s’en remettent donc au
savoir-faire de James Gunn qui signe ici le troisième volet
d’une licence jamais prise en défaut. Objectif pour les
studios Marvel : la réconciliation avec la fan-base.
Ô
Miracle !
Miracle ! Après une
palanquée de produits informes, sans aspérité et interchangeables, tous fabriqués
à la chaîne à partir d’une formule éculée, et dont les coutures scénaristiques se
voient pleinement à l’écran, « Guardians of the Galaxy Vol. 3 » est
la Marvelerie inespérée qui injecte enfin un tant soit peu de qualité dans un
univers cinématographique moribond. Et pourtant la tâche se montrait ardue au
regard des ambitions. Lisez plutôt : intégrer le retour de Gamorra après
son sinistre destin dans Endgame, introduire l’arrivée d’un personnage iconique
en la personne d’Adam Warlock suite à la scène post-générique du Volume 2,
développer la backstory déchirante de
Rocket Raccoon ou encore présenter le cruel Maître de l’évolution (excellent Chukwudi
Iwuji soit dit en passant) et ses mégalos desseins eugénistes. Le tout en
gardant précieusement le ton frais et insolent qui fait le charme des Gardiens
et en n’égratignant pas la « cohérence » (avec de très, très gros
guillemets) du MCU. Sans oublier l’enjeu principal formulé très tôt par
l’auteur-réalisateur débarqué de Disney (suite à des tweets injurieux datant de
Mathusalem exhumés sur la toile), puis réintégré (parce que non, finalement, l’Oncle
Walt préfère s’en mettre plein les fouilles en minimisant les risques et faire
fi de toute cohérence éthique) : conclure la trilogie. Une mission essentielle
pour le cinéaste qui officie dorénavant comme co-président de la maison rivale,
DC Studios.
Pied-de-nez
Le papa du génialissime
et méconnu « Super » sort par la grande porte. Cet ultime
« Volume » s’affiche fièrement comme une réussite incontestable. A la
loupe, on remarque que ce troisième opus fait la somme des qualités et des
caractéristiques de son auteur : imagination débordante et débridée, goût
pour le freak, attachement pour les
marginaux, sens du rythme, gags décalés, sursaut de violence, choix pertinent
des musiques pop vintage… Par ailleurs, le métrage recèle tout ce que le
spectateur lambda est en droit d’espérer lorsqu’il achète son ticket de cinéma
pour un divertissement de grande envergure budgété autour des 200 millions de
dollars : de l’aventure échevelée, de l’humour bon enfant, de la
générosité dans l’action, des effets-spéciaux renversants, des rebondissements
palpitants, de la virtuosité dans la mise en scène… Mais surtout, un chouïa d’inventivité
et une belle dose d’émotions, deux données fondamentales pour toute bonne fiction
qui se respecte et pourtant totalement absentes de la plupart des films de
super-héros ces dernières années. Sans réinventer ce qu’il faisait déjà il y a
presque dix ans lorsque celui-ci présentait son équipe de losers au grand cœur à
l’ensemble de la planète cinéma, Gunn remet les pendules à l’heure et, par-delà,
semble faire un pied-de-nez au grand manitou Kevin Feige, lequel a quelque peu
perdu de sa superbe en validant des monstruosités comme Black Panther, Black
Widow, Eternals, Shang-Shi, Captain Marvel…
James
Gunn, un cas à part
Le constat est frappant.
James Gunn est l’un des rares metteurs en scène de l’écurie Marvel qui est
parvenu à combiner le lourd, strict et restrictif cahier des charges avec la
singularité de son cinéma, tout en ne reniant pas une volonté artistique.
Contrairement à Taika Waititi qui a échoué dans une telle entreprise avec la
récente bouffonnerie « Thor : Love & Thunder », Gunn, lui,
aime profondément ses personnages. Il les respecte et leur confère un arc
narratif passionnant, entre évolution et émancipation, sans jamais trahir ce
qu’il a développé auparavant. En résulte un scénario bien ficelé qui s’apparente
à du pain béni pour la distribution. D’ailleurs, le casting se régale et cela
se voit à l’écran. Si le fond passionne, la forme étonne : décors
fantaisistes, costumes improbables et situations innovantes. Et si l’invraisemblable
rencontre régulièrement le chelou
dans les intentions graphiques déjantées du metteur en scène, ce dernier le
sert aux spectateurs en toute honnêteté. Conséquence : on accepte ces environnements
loufoques sans tiquer. C’est parfois kitch (la séquence sur Contre-Terre),
criard (les scènes sur la planète organique), sombre (les flash-back sur la
prime jeunesse de Rocket), mais toujours pertinent et réjouissant, parfaitement
en phase avec les deux premiers Volumes. Et surtout, cela change des directions
artistiques fadasses des autres Marvel.
This
is the end
En recentrant les enjeux
au niveau personnel (les Gardiens ne sauvent pas l’univers, mais bien leur ami
Rocket), Gunn livre une copie plus sérieuse, plus mélancolique, plus brutale, plus
humaine aussi, et sans doute plus mature. A ce propos, le récit gère
parfaitement sa charge émotionnelle en exploitant notamment la thématique
casse-gueule du bien-être animal liée au passé trouble et poignant du raton laveur génétiquement modifié.
Evidemment, l’irrévérence, la malice et le second degré sont toujours de la
partie, mais le tempo comique est mieux maîtrisé et cohabite sans heurt avec
les moments dramatiques, voire tragiques. En résulte un grand spectacle
cosmique solide et harmonieux qui, même s’il n’évite pas quelques passages à
vide et une superfétatoire surenchère numérique, fléau qui touche tous les
blockbusters hollywoodiens depuis le début des années 2010, réussit in fine sa
mission conclusive. Le cinéaste parvient non seulement à clôturer le chapitre des
Gardiens, mais aussi à laisser une porte entrouverte satisfaisante. Sait-on jamais
que Mickey veuille capitaliser davantage sur cette franchise. Les inévitables,
mais oubliables, scènes post-génériques vont d’ailleurs en ce sens.
Note : ★★★
Critique : Professeur Grant
Commentaires
Enregistrer un commentaire