Ghostbusters: Afterlife
Une mère célibataire et ses deux enfants s'installent dans une petite ville et découvrent peu à peu leur relation avec les chasseurs de fantômes et l'héritage légué par leur grand-père.
Au
nom du père
Reitman. Un patronyme bien
connu dans l’industrie cinématographique californienne. Après le père, le seul
et unique Ivan, intronisé ayatollah de la comédie populaire hollywoodienne
durant les années 80 et 90 avec des triomphes tels que les deux premiers
« Ghostbusters » ou encore les pitreries de la paire Schwarzenegger-DeVito
(Twins, Junior), c’est le fils, Jason, qui a repris le flambeau de la dynastie durant
les deux décennies suivantes en devenant le porte-drapeau d’un concept antinomique,
à savoir le cinéma indépendant… de studios ! Dans son cartable,
d’excellentes copies : « Juno », « Up In The Air » ou encore « Young Adult ». Alors
que les aficionados de « S.O.S Fantômes » ne se sont toujours pas
remis de la version féminine de 2016, perçue davantage comme la profanation
d’une franchise culte plutôt qu’une exhumation bienveillante, ceux-ci voient
débarquer dans les salles obscures une nouvelle itération. L’argument de la
production a de quoi les rassurer : éviter le spectre de la déconvenue de
masse en respectant le matériau de base du premier opus. Leur moyen ?
S’offrir la collaboration du tandem père-fils. Le daron comme caution, le
rejeton pour la modernisation.
Du
fils
Allons contre vents et
marées et calmons d’emblée le jeu en modérant l’effervescence excessive qui
entoure ce long-métrage depuis les premiers avis dithyrambiques tombés sur la
toile. Car la promesse n’est tenue qu’à moitié ; de renouveau, il n’en
sera pas vraiment question. Ni d’évolution. Et encore moins de
révolution ! En substance, la pellicule peut aisément se diviser en deux
parties. La première, sans conteste la plus réussie, fait montre des qualités
indéniables de son auteur-réalisateur : la finesse du trait dans l’esquisse
des personnages, la direction d’acteurs irréprochable, le formidable travail
sur l’ambiance, la science de la mise en scène, le souci d’un certain réalisme
dans les interactions, l’usage d’un humour rafraîchissant. On retrouve tout ce
qu’on apprécie dans son cinéma et en particulier sa gestion du temps. A
contre-courant des tendances actuelles de rythme, il est l’un des seuls
cinéastes de sa génération capable d’installer une histoire sans craindre la
durée nécessaire pour exposer les enjeux. Cependant, une fois la menace
spectrale éventée, ce film résolument bicéphale voire schizophrène bascule sans
modération dans la naphtaline eighties
au doux parfum Amblin. Avec comme mètre étalon la série « Stranger
Things » produite par Netflix.
Et
du Saint-Esprit
Si le studio Sony promet
un « héritage » à travers son
affiche française, en réalité, le métrage tapine et joue plutôt la carte du
recyclage. Reitman et son co-scénariste Gil Kenan (l’oubliable remake de
Poltergeist) récupèrent ce qui a été proposé il y a plus de trente-cinq ans
tout en nous gavant de fan-service (références, easter eggs, hommages trop appuyés…) pas toujours amené très
subtilement. D’ailleurs, la finesse du début laisse place à une dynamique
putassière qui tente vainement de séduire le fandom et lui refourguent tout ce qu’il attend sans se soucier d’amener
quelque chose de neuf. Les ambitions singulières se voient alors écrasées sous
une avalanche nostalgique pâlotte et fadasse. Et la fiction de quitter le
vénérable chemin (de croix) de la créativité pour prendre l’autoroute du
produit mercantile. Poussif, stérile et paresseux, le scénario ne se montre pas
à la hauteur de l’Esprit Saint du premier volet. La mécanique narrative
toussote au point que les auteurs s’en remettent à quelques facilités. Suspension
consentie d’incrédulité, bonjour ! On épingle ainsi plusieurs incohérences
avec l’univers de la saga (amnésie de masse concernant le séisme paranormal de
84 ?), mais aussi avec les éléments de sa propre histoire (personne n’a
peur des ectoplasmes). C’est ballot !
Amen
Quelques maladresses
viennent également ternir le visionnage à l’image d’un final complètement raté.
On a l’impression que Jason Reitman, amoureux transi des personnages de son
enfance, est paralysé par la tournure des événements. Devenu le spectateur de
son propre film, il en vient à oublier ses obligations de réalisateur.
Conséquences : montage et mise en scène passent à la trappe dans ce
dernier acte interminable. En résulte un climax foireux avec des scènes embarrassantes
dans lesquelles certains comédiens, n’ayant rien à jouer, se demandent pourquoi
ils ont été rappelés. Impuissant, piégé dans son fauteuil, le spectateur
assiste à ce malaise sans pouvoir détourner les yeux de l’écran. Et ce qui
devait être une surprise, quoique déjà bien cramée par la promotion, s’avère in
fine être un gros loupé. Cela émis, on ne peut nier que l’ensemble surfe sur
une vague de bonnes vibrations. Le divertissement feel-good et vintage
fonctionne à plein régime et on se passionne pour les personnages brillamment
interprétés par des comédiens investis. Geeks de la première heure et nouvelle
génération devraient s’y retrouver tandis que le cinéphile, lui, regrettera le
manque d’aspérité, d’impertinence, et d’effroi qu’il était en droit d’attendre
d’une telle licence.
Note : ★★★
Critique : Professeur Grant
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