Bilan 2019 - le "Top 10" du Professeur Grant
Hier
2019, aujourd’hui 2020. Sacrifions à la tradition. Place à la rétrospective
cinématographique. Comme le dit l’adage, choisir, c’est renoncer. Voici les dix
longs-métrages qu’il ne fallait pas louper l’année dernière.
1. The Favourite
Coups bas, crêpages de perruques, joutes verbales détonantes, vengeances ourdies à la lueur d’une bougie, Olivia Colman (oscarisée pour ce film), Emma Stone et Rachel Weisz s’en donnent à cœur joie et livrent des performances démentes dans cette comédie baroque, maligne et frivole. Le drame et la loufoquerie cohabitent dans cette farce diablement efficace et mis en scène avec une impressionnante virtuosité par Yórgos Lánthimos (The Lobster).
2. Parasite
Thriller satirique, fable
sociale, comédie noire, drame familial, « Parasite », c’est tout ça à la fois
et bien plus encore. Bong Joon-ho orchestre de mains de maître un récit d’une
incroyable richesse qui multiplie les rebondissements imprévisibles ainsi que
les dialogues savoureux. Un scénar’ brillant et limpide qui ne se contente pas
de son fameux coup de théâtre, lequel est, par ailleurs, savamment amené.
Hargneux, fluide, redoutable, intelligent, burlesque, kafkaïen, un très grand
film !
3. Joker
Todd Phillips (The
Hangover Trilogy) signe un feel-bad movie
anxiogène, mais surtout un authentique chef-d’œuvre aux allures de film
d’auteur populaire. Aucune scène n’est à jeter, offrant par-delà un montage
dynamique. Pas un bout de gras, pas de redondance, pas de longueur. Le récit
est fluide, la mécanique bien huilée, le génie partout. Chaque plan est calibré
au millimètre près, shooté au moyen d’une photographie irréprochable. Put on a
happy face !
4. J’Accuse
Un film réalisé par des
orfèvres. Lisez plutôt : scénario écrit au cordeau par le tandem Robert
Harris/Roman Polanski (The Ghost Writer), direction artistique irréprochable de
Jean Rabasse (Delicatessen), superbe photographie de Pawel Edelman (Le
Pianiste), partition subtile d’Alexandre Desplat (The Shape of Water). Sans
oublier la mise en scène d’un classicisme idoine et assumé qui achève de faire
de ce « J’accuse » la grande œuvre qu’on était en droit d’espérer.
5. Marriage Story
Cinéaste passé maître dans l’art de questionner le couple, Noah Baumbach a tout simplement signé, en 2019, le meilleur film de sa carrière. « Marriage Story » est une chronique sensible d’une féroce acuité sur les affres du divorce. Le récit dissèque avec une précision chirurgicale ce déchirement entre deux personnes. Outre la finesse du scénario et, en particulier, la qualité des dialogues, on retiendra les prestations poignantes de Scarlett Johansson et, surtout, d’Adam Driver.
6. Les Misérables
Rares sont les jeunes réal’
à réussir à transcrire leur court-métrage en long. Ladj Ly, lui, y est parvenu
avec un film coup de poing qui n’est pas sans rappeler un certain « La
Haine » de Kassovitz. Un coup de maître qui sidère par sa maîtrise : mise
en scène punchy, puissance narrative,
interprétations aux petits oignons… Sans manichéisme et avec un regard affûté,
le jeune cinéaste aborde la question brûlante des cités jusqu’à une séquence
finale à couper le souffle. Imparable !
7. Once Upon A Time in
Hollywood
Œuvre-somme aux allures
d’hommage à la Mecque du cinéma, cocktail épicé de pop culture, voyage
cinéphile et onirique, chronique élégiaque sur fond de tragi-comédie, « Once
Upon a Time in… Hollywood » est un film hors-norme, parfait reflet de la
démesure du génie virtuose qui se tient derrière la caméra : Quentin
Tarantino. Enthousiasmant, jubilatoire, foisonnant, son pénultième film en tant
que réalisateur est sans conteste l’un de ses meilleurs, le plus personnel
aussi.
8. Hors Normes
Voici une chronique
humaniste pleine de vie et de chaleur humaine qui a le mérite de nous émouvoir
sans sombrer dans la facilité du pathos et qui entend bien faire bouger les
lignes, impliquer le politique et modifier le regard que l’on porte sur les
autistes. On aurait pu craindre un drame moralisateur, lénifiant, se contentant
d’un chapelet de bons sentiments et d’un happy end. Nenni ! Le scénario
soigneusement écrit et imbibé d’une intelligence narrative respecte le
spectateur.
9. Vice
Avec son sens aiguisé du
rythme et de la vulgarisation, Adam McKay démont(r)e les rouages de la
politique américaine contemporaine, nous permettant d’entrevoir les failles du
système expliquant des investitures controversées (Bush fils et, par
extrapolation, Trump). Féroce, fouillé, dense, survolté, grinçant, « Vice »
vaut également le détour pour la performance stupéfiante du plus transformiste
des acteurs hollywoodiens, Christian Bale, à nouveau méconnaissable.
10. Knives Out
Merveilleusement old
school dans le traitement et le décorum (un manoir, une famille, un meurtre)
mais aussi moderne en bousculant les codes de la detective story habituelle (c’est l’aide à domicile le protagoniste
et non le fin limier), ce whodunit au
casting rutilant n’en finit pas de nous surprendre. Maîtrisé, habile, sournois,
subversif, ce Cluedo est une partie de plaisir pour le spectateur. Rian Johnson
lui laissant le soin de reconstituer le puzzle tout en brouillant les pistes.
Et
les autres…
Sans oublier le magistral
« The Irishman » signé par
l’illustre paire Martin Scorsese/Steven Zaillian, le Pixarien « Toy Story 4 », lequel
parvient à exister en tant que suite directe d’un chef-d’œuvre incontesté,
l’incroyable surprise « Dolemite is
My Name » et le come-back flamboyant du désopilant Eddy Murphy (grosse
surprise de l’année sur Netflix), le très beau « If Beale Street Could Talk » paraphé par l’orfèvre
Barry Jenkins (l’oscarisé Moonlight), et, enfin, l’excellente surprise « Duelles » d’Olivier
Masset-Depasse (Illégales), thriller belgo-belge de très haute volée. De quoi
faire de ce déjà beau Top 10 un étincelant Top 15 !
- Professeur Grant -
Commentaires
Enregistrer un commentaire