Trap

 


Un concert. 30 000 spectateurs. 300 policiers. Un tueur. S’échappera-t-il ?

 


Avec « Trap », M. Night Shyamalan se hisse à nouveau sur le podium des réalisateurs tendance. Le cinéaste revient constamment avec des idées novatrices qui laissent souvent son audience sans voix. Avec ses changements de ton, son mélange finement dosé entre humour et tension, le dernier film du réalisateur américain surprend.



C’est sans doute le meilleur film dans la filmographie récente du cinéaste bien qu’il ne soit pas exempt de défauts. Pourtant un grand habitué aux plot twists, Shyamalan opte cette fois pour une révélation précoce, rendant ce long-métrage curieusement plus tendu que la plupart de ces prédécesseurs. Mais chassez le naturel… et Shyamalan nous ressort un bon vieux renversement de situation pendant un troisième acte qui par la même occasion s’essouffle et ne convainc pas jusqu’au bout.



Josh Hartnett épate. Chaque petit rictus et mimique semblent parfaitement calibrés. Ariel Donoghue, âgée de quatorze ans, bouleverse par son professionnalisme. Mais la révélation est sans conteste Saleka Shyamalan, la fille aînée du réalisateur. Véritable chanteuse R&B, cette dernière a enregistré un album pour le film et y interprète avec brio le personnage de Lady Raven.



Soignée, la photographie de Sayombhu Mukdeeprom (« Call Me by Your Name » ou encore « Suspiria ») retranscrit avec aisance l’effervescence d’un concert. 



Efficace thriller porté par un Josh Hartnett offrant une performance de premier ordre, « Trap » est loin d’être le piège estival de l’année. Pour profiter du film, le mieux est encore d’en savoir le moins possible. Cela ne vaut peut-être pas un film de Jordan Peele, mais ne boudons pas notre plaisir !



Note :

Critique : Goupil

Autre critique, autre point de vue - « Trap » vu par le Professeur Grant :

M. Night Shyamalan : Rise & Fall

2024, année shyamalanesque ! Après la fille, Ishana et ses sinistres Watchers, je demande le père, Manoj, prêt à tendre un nouveau piège (Trap, actuellement dans les salles obscures) aux spectateurs. L’occasion pour nous de regarder brièvement dans le rétroviseur et de revenir sur une carrière en dents de scie, entre ascension fulgurante et chute vertigineuse.

Passé du statut de petit génie porté au pinacle par l’aréopage cinéphilique, à l’orée des années 2000, à celui de pestiféré de la pellicule dès 2006, le réalisateur indo-américain a vécu toutes sortes d’émotions et s’est vu attribué tous les qualificatifs possibles et inimaginables par une presse qui s’en est donnée à cœur joie. Il faut dire que celui que d’aucuns voyaient déjà comme le digne successeur de Steven Spielberg (rien que ça !) a trébuché plus d’une fois sur le parcours d’une filmographie de plus en plus inégale au fil des ans.

Après la glorieuse période des « fantastic four », à savoir l’exceptionnelle livraison The Sixth Sense, Unbreakable, Signs (NDLR : on ne l’écrira jamais assez, ce film est incompréhensiblement sous-estimé !) et The Village, le cinéphile a assisté à la folle et triste dégringolade synthétisée par les « authentiques fours » que sont les difficilement regardables Lady in The Water, The Happening, The Last Airbender et Ater Earth.

La suite de ses pérégrinations cinématographiques se situe dans un ventre mou pas folichon dont la jauge varie entre le « pas désagréable » (Knock at The Cabin, Split) et le « complètement oubliable » (The Visit, Old), en passant par le « dispensable » (Glass). Du coup, la question qui nous occupe en cette période estivale : où se situe la nouvelle fiction de notre auteur mal-aimé dans le baromètre shyamalanesque ?

Bergerie et souricière

Réponse sans détour : dans le « pas désagréable ». Autrement dit, ne vous attendez pas à une claque revigorante comme celle reçue par chaque métrage sorti durant l’âge d’or du cinéaste. Pas de scénario béton à la Sixième sens, pas de maîtrise totale à la Incassable, pas de mise en scène ciselée à la Signes ou d’atmosphère travaillée comme sur Le Village. Non, rien de tout cela.

Néanmoins, le métrage possède plus d’un tour dans son sac pour vous assurer un divertissement de tous les instants. M. Night Shyamalan démontre derechef son art du pitch implacable. Celui qui vous donne envie de vous rendre fissa en salles. Un high concept génial qu’il tente cahin-caha de déployer tout au long d’un récit efficace à défaut d’être subtil et soigneusement ficelé.

L’histoire ? Celle d’un loup dans la bergerie. Sauf que la bergerie se révèle être une souricière pour capturer le prédateur. Traduction à l’écran : un concert, 30.000 spectateurs, 300 policiers et… un serial killer, notre « héros » du jour. Cooper, papa poule d’une groupie et tueur en série sanguinaire à ses heures perdues, se retrouve pris au piège (le fameux Trap du titre) par les forces de l’ordre en plein cœur d’un énorme show musical à la Taylor Swift. S’échappera-t-il ? Oui ? Non ? Mystère et boule de gomme.

Une série B bicéphale

Coupé en deux segments bien distincts, Trap ne parvient pas à se défaire de sa nature bicéphale pour être totalement cohérent. La première partie, trépidante à souhait, est sans conteste la plus réussie. Le film prend l’allure d’un huis clos immersif qui n’est pas sans rappeler l’excellent et mésestimé Snake Eyes de Brian De Palma. Le natif de Philadelphie y démontre tout son savoir-faire en termes de narration et de mise en scène, jouant habilement avec les possibilités offertes par la scénographie d’une salle d’événement pleine à craquer.

Suspense, tension, surprises, rebondissements, le cinéaste s’amuse avec les mille-et-une péripéties de son protagoniste, faisant de son thriller musical (la starlette est interprétée par sa deuxième fille, Saleka Shyamalan) un improbable jeu du chat et de la souris au ton léger et amusant. Ludique et captivant, le métrage dérape ensuite dans une deuxième partie déforcée par une écriture moins rigoureuse.

Les facilités, invraisemblances et autres incohérences mettent la suspension d’incrédulité des spectateurs à rude épreuve et auront in fine raison de leur patience, même aux plus candides d’entre eux. Les ficelles scénaristiques beaucoup trop apparentes nous empêchent de crier au génie, même s’il faut reconnaître au réalisateur un véritable sens du spectacle, un poil trop généreux dans le climax, lequel empile ad nauseam les retournements de situation hasardeux.

Le film en deviendrait presque burlesque, tant les situations décrites flirtent avec la comédie, élément totalement assumé par Shyamalan dans sa note d’intention. Et c’est justement ce ton improbable qui fait tout le charme de cette série B. Notons également l’impeccable interprétation de Josh Hartnett, constamment sur le fil du rasoir, entre le héros d’un thriller tendu et la figure exubérante d’une satire. C’est d’ailleurs son jeu parfaitement maîtrisé qui fait la force du métrage, lequel manque malgré tout de rigueur et d’harmonisation pour convaincre et emporter totalement notre adhésion.

Note : 
Critique : Professeur Grant

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