Alien: Romulus

 


Alors qu’il entreprend des fouilles dans une station spatiale abandonnée, un groupe de jeunes voyageurs se retrouve confronté à la forme de vie la plus terrifiante de l'univers…



Le Retour du Huitième passager

Embargo levé, ne laissons pas planer le doute plus longtemps, Alien : Romulus est une réussite. Point. Mirettes fatiguées et pupilles fainéantes peuvent s’arrêter ici et se rendre séance tenante chez leur exploitant de salles obscures préféré pour se flanquer la chair de poule. A ce propos, offrez-vous l’Imax, ce blockbuster en vaut vraiment la peine. C’est peut-être le plus beau cadeau proposé cette année par l’empire Disney qui nous avait déjà pas mal étonné avec un Kingdom of the Planet of the Apes de derrière les fagots, autre licence dont on n’attendait pas grand-chose. Si comme votre humble serviteur, vous chérissez l’atmosphère pesante du premier Alien (Le Huitième Passager), chef-d’œuvre inégalé signé par ce bon vieux Ridley Scott, et éprouvez un plaisir incommensurable à revoir encore et encore (et encore !) l’actionner Aliens (Le Retour) imaginé par James Cameron, vous allez adorer ce nouveau volet qui réussit à nous faire oublier l’indésirable Covenant, lequel était parvenu à tuer dans l’œuf les belles promesses de Prometheus et à compromettre les fondements de cette saga culte.

In space no one can hear you scream

A l’origine de cette nouvelle suite qui prend place, chronologiquement, entre les deux premiers opus, Fede Álvarez, papa de l’étonnant Don’t Breathe et du médiocre The Girl in the Spider's Web issu de la franchise Millenium. Adoubé par Scott himself, ce choix, au premier abord étonnant, s’avère judicieux. Surtout quand on se remémore son brutal et sanguinolent reboot d’Evil Dead, boucherie hardcore sortie il y a déjà une décennie et qui nous avait laissé une plutôt bonne impression. Egalement à la plume sur le scénario de Romulus, l’Uruguayen propose deux idées fondamentales : revenir à l’ambiance poisseuse des premiers métrages et rajeunir les protagonistes. Le pitch ne vous surprendra guère : alors qu’elle entreprend des fouilles dans une station spatiale abandonnée en vue d’un avenir meilleur, une escouade de jeunes prolétaires se retrouve confrontée à la forme de vie la plus terrifiante de l’univers. Et ils auront beau s’égosiller, tout bon fan se rappellera alors que dans l’espace, personne ne vous entend crier.

Facehugger – Chestbuster - Xenomorph

Rien de nouveau sous le soleil et ce n’est pas dérangeant, car le réalisateur livre ce que les aficionados de la première heure attendent, soit une pure série b d’épouvante. En cela, c’est mission accomplie. Et le moins que l’on puisse écrire, c’est que le Sud-Américain s’attelle à la tâche non sans une véritable maestria dans l’art délicat de la mise en scène. Que ce soit la première partie d’exposition qui renoue avec l’atmosphère désespérée et sordide ou durant le climax glauque et éprouvant avec des séquences d’action originales et efficaces (l’usage de la gravité zéro, une idée qui claque visuellement !), le quadragénaire se montre créatif, mais aussi vicieux, et même sadique vis-à-vis de ses personnages (excellent casting d’inconnus soit dit en passant) à qui il ne donne aucune minute de répit. Ce dernier connaît l’adage : c’est dans les vieux pots qu’on fait la meilleure soupe. Du coup, pas de révolution au menu, mais bien une impressionnante inventivité dans les passages obligés : l’attendue attaque des facehuggers est intense et suffocante à souhait, l’iconique scène chestbuster vous glace le sang (le scanner à rayons X, bien vu Fede !) et la révélation du xénomorphe joue pleinement la carte de l’effroi.

Álvarez connaît ses classiques

On le voit d’emblée, les classiques Alien et Aliens (Twisters n’a rien inventé, l’idée du « s » final revient à Tonton Cameron, utilisée jadis pour pitcher sa sequel à la Fox) forment les deux films de chevet d’Álvarez, fan hardcore de la licence, à qui il rend quelques hommages (on tait ici les clins d’œil et autres easter eggs). Ce dernier ne laisse rien au hasard, quel que soit le poste technique. Outre l’ingénieux travail sur le son, soulignons ici la qualité de la direction artistique qui renoue avec une esthétique cyberpunk organique et quelque peu crado, aux antipodes des animations 3D proprettes et pas toujours heureuses des épisodes post-nineties. Le soin apporté à la production design rétro-futuriste des années 70/80 (utilisation de miniatures), pour que l’épisode s’insère sans heurt entre les deux premiers chapitres de la franchise, nous a complètement bluffé. Question SFX, le mariage entre les effets pratiques et numériques est idyllique et rend justice à l’œuvre du Suisse Hans Ruedi Giger, designer de la créature biomécanique dont la perfection structurale n’a d’égal que son hostilité. Quant à la photographie, lorgnant du côté du clair-obscur crépusculaire, elle est absolument splendide.

Du sang, des boyaux, de la rate et du cerveau

Impossible de ne pas être sous tension, d’autant plus que le cinéaste maîtrise le rythme de son film, gérant judicieusement ses effets et rebondissements, et prend un malin plaisir à faire monter la pression. Le dernier acte est à couper le souffle ! Les plus fanatiques regretteront le manque de tripaille et d’hémoglobine ; cette version pour les salles semble quelque peu édulcorée en termes de gore et de violence viscérale. Cela émis, rien de dérangeant pour ce retour aux sources qui parvient à donner un coup de fouet à une licence qu’on pensait définitivement perdue entre les mains de son géniteur. Heureusement, comme pour Blade Runner, Sir Scott a finalement fait un pas de côté pour laisser le champ libre à un jeune confrère. Avec Alien : Romulus, Fede Álvarez reprend brillamment le flambeau et montre qu’il a parfaitement digéré les codes de la saga en réalisant une synthèse de ce que la franchise a produit de meilleur : on y retrouve ainsi la science-fiction horrifico-atmosphérique du premier ainsi que la générosité en sensations fortes du deuxième.

In fine, s’il s’agit davantage d’un supplément de luxe que d’un indispensable complément à la série de films, il fera plaisir à tous ceux qui ont connu leur première peur panique en compagnie du huitième passager.

Note : 
Critique : Professeur Grant

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