An
Les dorayakis sont des pâtisseries traditionnelles japonaises qui se composent de deux pancakes fourrés de pâte de haricots rouges confits, «AN».Tokue, une femme de 70 ans, va tenter de convaincre Sentaro, le vendeur de dorayakis, de l’embaucher. Tokue a le secret d’une pâte exquise et la petite échoppe devient un endroit incontournable...
Sélectionné dans la section parallèle «Un Certain Regard», «An» avait réussi à charmer le tout-regardant sur la Croisette lors du dernier Festival de Cannes. Son délicieux mélange de douce mélancolie et de poésie subtile a conquis les cinéphiles du monde entier. Aujourd’hui, c’est au tour de la Belgique de goûter à ces «Délices de Tokyo».
Dans son dixième long
métrage, Naomi Kawase (Still The Water), réalisatrice issue d’un cinéma
d’auteur exigeant, raconte la rencontre entre Tokue, une septuagénaire
pétillante et pleine de sève, et Sentaro, un quadra éteint, pris d’un mal qui
le ronge au plus profond de son âme. Dans sa gargote, le pâtissier cuisine des dorayakis,
entendez une sorte de pancake nippon.
Sa bicoque n’attire pas
grand monde. Seule une poignée d’habitués viennent lui rendre visite. Alors
qu’il recherche un partenaire, Tokue se présente par hasard et insiste pour travailler.
D’abord réticent au regard de l’âge avancé de la dame, le Tokyoïte se laisse
finalement convaincre. Bien lui en a valu. Non seulement, elle détient le
secret d’une pâte exquise mais, en sus, celle-ci l’aidera à le sortir de son
mal-être.
Sous ses atours mignons
et enchanteurs avec ses plans «carte postale» (ah, ces cerisiers en fleurs!) se
cache une richesse de thèmes passionnants comme la solitude face à la violence
sourde de nos sociétés contemporaines, la tolérance à l’égard des marginaux, la
transmission entre générations, la place des anciens, la vie des indésirables…
La cinéaste va bien
au-delà de le chronique épicurienne et offre un véritable rapport au monde,
questionne le sens de l’existence à travers des personnages en suspens. Le
récit avance doucement, au rythme des saisons, avec une grâce et une légèreté
qui bercent le spectateur. Là où d’aucuns parleraient de lenteur, nous
préférons y voir la volonté de la cinéaste de proposer un cinéma contemplatif qui
attise la réflexion.
De ce conte urbain se
dégage une infinie douceur soutenue par une merveilleuse photographie. Bien
plus qu’un mélodrame mièvre lu par-ci par-là, même si l’on pourra regretter une
certaine complaisance à étirer les séquences émouvantes, «An» est avant tout
une fable philosophique à déguster sans retenue qui permet, en outre, de nous
offrir un regard singulier sur le Pays du Soleil Levant d’aujourd’hui.
Note: ★★★★
Critique: Professeur Grant
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