La Vie d'Adèle: Chapitres 1 & 2
À 15 ans, Adèle ne se pose pas de question : une fille, ça sort avec des garçons. Sa vie bascule le jour où elle rencontre Emma, une jeune femme aux cheveux bleus, qui lui fait découvrir le désir et lui permettra de s’affirmer en tant que femme et adulte. Face au regard des autres Adèle grandit, se cherche, se perd, se trouve...
La vie d’Adèle
est passionnante. Adèle dort, Adèle marche, Adèle mange (comme un porc), Adèle
fume, Adèle baise, Adèle remet ses cheveux, Adèle pleure. Ensuite, Adèle dort,
Adèle marche, Adèle mange (comme un porc), Adèle fume, Adèle baise, Adèle remet
ses cheveux, Adèle pleure. Enfin, Adèle dort, Adèle marche, Adèle mange (comme
un porc), Adèle fume, Adèle baise, Adèle remet ses cheveux, Adèle pleure. Oh!,
ne vous ai-je pas dit qu’Adèle dort, Adèle marche, Adèle… ? Et tout ça en gros plan
pendant trois heures, s’il vous plait. Sinon ce ne serait pas drôle.
Du reste, il y a une erreur dans le titre du film. Ce n’est pas «La Vie d’Adèle:
Chapitres 1 & 2». Non, c’est plutôt «La Vie d’Adèle: Chapitres 1 & 2
& 3 & 4 & 10 & 25 & 50… Long, mais long! Trop long pour une
histoire somme toute banale qui raconte la vie trépidante (!) d’une ado qui découvre sa
sexualité et ses premiers émois amoureux.
En réalité, Abdellatif Kechiche (Vénus
Noire, La Graine et Le Mulet, L’Esquive) s’est fait plaisir au moment du montage. Il a tout gardé. Les scènes inutiles, les
séquences répétitives, les moments tirés en longueur etc. C’est sûr, la post-production
n’a pas dû poser trop de soucis. Du coup, c’est au spectateur de faire le tri
dans ce trop-plein d’images. Le réalisateur a également assouvi son petit côté
voyeur avec des scènes saphiques gratuites à rallonge. D’ailleurs, l’anatomie
d’Adèle n’a plus aucun secret pour nous. Un peu comme si le metteur en scène
avait la soudaine ambition de voir son (trop) long-métrage être diffusé sur You Porn.
Le metteur en scène joue explicitement la carte de la provoc’, dérange, met mal à l’aise et tout ça
sans raison, sans fondement.
Autrement dit, celui-ci s’égare par moments. On a comme la mauvaise impression d’assister à des instants qu’on ne devrait pas voir. Julie Maroh, auteure du roman graphique «Le Bleu est une couleur chaude» sur lequel Kechiche s'est librement basé, n'y voit d'ailleurs qu'un «étalage brutal et chirurgical, démonstratif et froid de sexe dit lesbien, qui tourne au porn, et qui m’a mise très mal à l’aise. Surtout quand, au milieu d’une salle de cinéma, tout le monde pouffe de rire. Les hétéronormé-e-s parce qu’ils/elles ne comprennent pas et trouvent la scène ridicule. Les homos et autres transidentités parce que ça n’est pas crédible et qu’ils/elles trouvent tout autant la scène ridicule. Et parmi les seuls qu’on n’entend pas rire, il y a les éventuels mecs qui sont trop occupés à se rincer l’œil devant l’incarnation de l’un de leurs fantasmes».
Autrement dit, celui-ci s’égare par moments. On a comme la mauvaise impression d’assister à des instants qu’on ne devrait pas voir. Julie Maroh, auteure du roman graphique «Le Bleu est une couleur chaude» sur lequel Kechiche s'est librement basé, n'y voit d'ailleurs qu'un «étalage brutal et chirurgical, démonstratif et froid de sexe dit lesbien, qui tourne au porn, et qui m’a mise très mal à l’aise. Surtout quand, au milieu d’une salle de cinéma, tout le monde pouffe de rire. Les hétéronormé-e-s parce qu’ils/elles ne comprennent pas et trouvent la scène ridicule. Les homos et autres transidentités parce que ça n’est pas crédible et qu’ils/elles trouvent tout autant la scène ridicule. Et parmi les seuls qu’on n’entend pas rire, il y a les éventuels mecs qui sont trop occupés à se rincer l’œil devant l’incarnation de l’un de leurs fantasmes».
Kechiche est finalement à l’image de son
film. Il ne parvient pas à s’extirper de son récit, à prendre du recul, à extraire le futile pour ne garder que l'essence même de son histoire d'amour. Ce
dernier ne quitte jamais le cadre serré. Comme si le Tunisien ne connaissait que le gros
plan. On en est vite gêné pour le cinéaste qui, totalement aveuglé par son
travail, se complaît dans d'interminables scènes superfétatoires. En définitive, on
est quand même aux antipodes du chef-d’œuvre annoncé, terme on ne peut plus
galvaudé aujourd’hui à cause d’une presse qui s’emballe sans raison et crie au
génie là où il n’y a finalement que très peu de fond. De
nombreux défauts parsèment le métrage. Il faut raison garder. Des qualités aussi, ne l'ignorons pas. Car il serait injuste de réduire La Vie D’Adèle aux quelques
errements de Kechiche.
Heureusement pour lui et surtout pour
nous, Léa Seydoux, qu'on a adoré cette année dans Grand Central, et Adèle Exarchopoulos, un diamant à l'état brut, sont extraordinaires, toutes les deux exceptionnelles
de générosité. C’est grâce à elles que l’on peut davantage parler de grande
œuvre plutôt que de long film. Les deux comédiennes portent littéralement
l’histoire, crèvent l’écran, irradient sur chaque plan, livrent des émotions
vraies, brutes de décoffrage, et parviennent à nous faire croire à leur liaison
passionnelle. Elles n’ont pas volé leur «mention spéciale» attribué par un jury cannois conquis emmené par Steven
Spielberg himself en mai dernier sur la Croisette.
Faisons fi de la polémique sur les conditions de tournages et du statut de tyran du metteur en scène - selon les dires de son équipe technique et des deux actrices principales - et saluons son travail époustouflant de direction d’acteurs, en perpétuelle recherche de la quintessence de la vérité que ce soit dans les situations de vie quotidienne, dans les émotions, dans les interactions... Un hyper-réalisme qui fait parfois penser au cinéma des frères Dardenne.
En substance, dans le match des «chefs-d’œuvre» automnaux, Gravity (4 étoiles) bat par K.O. La Vie d'Adèle (3 étoiles). Alfonso Cuarón terrasse Abdellatif Kechiche. Mais, qu'on se le dise, les deux métrages sont absolument à voir. Avec Prisoners et Rush, octobre s'est affiché comme étant, de loin, le mois le plus intéressant cette année d'un point de vue purement cinématographique.
Faisons fi de la polémique sur les conditions de tournages et du statut de tyran du metteur en scène - selon les dires de son équipe technique et des deux actrices principales - et saluons son travail époustouflant de direction d’acteurs, en perpétuelle recherche de la quintessence de la vérité que ce soit dans les situations de vie quotidienne, dans les émotions, dans les interactions... Un hyper-réalisme qui fait parfois penser au cinéma des frères Dardenne.
En substance, dans le match des «chefs-d’œuvre» automnaux, Gravity (4 étoiles) bat par K.O. La Vie d'Adèle (3 étoiles). Alfonso Cuarón terrasse Abdellatif Kechiche. Mais, qu'on se le dise, les deux métrages sont absolument à voir. Avec Prisoners et Rush, octobre s'est affiché comme étant, de loin, le mois le plus intéressant cette année d'un point de vue purement cinématographique.
Note: ★★★
Critique: Professeur Grant
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